16 nov. 2020

Zoom sur les chaines de télévision implantées à Madagascar

 

Madagascar a été classée 54e sur 180 pays recensés par Reporters sans Frontières. En 2019, le pays a été mieux classée que sa voisine, l'île Maurice (56e) et bien loin devant le Rwanda, relégué à la 155e place. 

Cette relative liberté de la presse se manifeste par la multitude de chaînes de télévision qui accrochent les réseaux hertziens de l'île. 

Comme de nombreux médias, la majorité des chaînes diffusent leurs images dans la capitale Antananarivo. On y compte une quinzaine, tandis que les autres grandes villes comptabilisent entre deux et six chaînes. 

TVM : la seule chaîne à diffusion nationale

A la date d'aujourd'hui, la TVM (Televiziona Malagasy), chaîne du service public, est la seule à pouvoir émettre sur l'ensemble du territoire malgache. Des promesses politiques ont déjà été annoncées par les différents politiques qui se sont succédé, mais rien ne s'est encore concrétisé. 

Quelques chaînes privées avec des antennes régionales

Des chaines comme la RTA (RAdio Télévison Analamanga), VIVA, Dream'in ou encore TV Plus disposent d'antennes régionales dans certaines localités pour capter une audience locale. Les émetteurs n'émettent généralement pas au-delà d'une vingtaine de kilomètres pour se conformer aux textes en vigueur. 

Une qualité de production avec une immense marge de progression

En parlant de la chaîne publique nationale ou des chaînes privées, les productions malgaches présentent des contenus et une maîtrise technique d'assez faible niveau. De nombreux facteurs affectent la qualité technique et artistique des différentes émissions proposées :
  • Un manque de formation des réalisateurs, de l'équipe technique et des journalistes,
  • Une propension à la copie au détriment de l'innovation. Les émissions à succès étrangers sont tout simplement imités,
  • L'absence d'une véritable politique rédactionnelle au niveau de la programmation. Le seul constat des nombreuses fautes grammaticales illustrent le manque de rigueur et de professionnalisme,
  • Une exigence stylistique insuffisante,
  • Le manque de matériels professionnels pour la captation, le traitement et la diffusion des images.
Il est vrai qu'il est difficile de définir le niveau de qualité, mais il faut être lucide dans le constat des faits pour affirmer sans ambiguïté qu'il y a encore une très belle marge de progression, ne serait-ce qu'en mettant en oeuvre l'utilisation optimale des matériels déjà en place.

Une reconnaissance insuffisante du métier de journaliste

Point commun avec les autres médias malgaches, le métier de journaliste n'est pas reconnu à sa juste valeur. Il en résulte alors une crise des vocations et des motivations. Les meilleures plumes privilégient des emplois plus rémunérateurs, quoique moins visibles, auprès des entreprises offshore.

L'auto-censure est de mise par crainte des représailles de la part des autorités publiques, mais aussi des propriétaires des groupes médiatiques. Il faut en effet savoir que les chaînes malgaches restent largement sous influence de leur propriétaire, dont le dessein politique est souvent incommensurable. 

Un accès difficile aux chaines de télévision malgache

Pour regarder la télévision, il faut avoir de l'électricité et être dans le périmètre de diffusion. Accessoirement, il faut avoir les moyens de disposer d'un poste téléviseur. La grande majorité des modèles disponibles auprès des foyers équipés est encore cathodique. Les écrans plats se démocratisent uniquement auprès des familles aisés et des travailleurs de la classe moyenne supérieure. 

Le profil du public télévisuel type à Madagascar est donc un citadin, disposant d'un emploi ou d'une activité rémunératrice et domicilié dans un foyer branché au réseau électrique. Selon une étude publiée par la Banque Mondiale, 36 % de la population urbaine possède un poste téléviseur (chiffres 2010), contre seulement 6 % en milieu rural. 

Les chaines de télévision comme plateforme de débat

On peut critiquer la qualité de production des chaines malgaches, mais on ne peut pas lui ôter sa pluralité. Si toutes les chaines peuvent être classées comme généralistes, exception faite des rares chaines évangéliques, elles font montre d'une réelle volonté d'animer la démocratie. Alors que les manifestations sur les voies publiques font souvent l'objet de restriction, la diffusion des idées à travers différentes émissions n'est généralement pas restreinte. 

Chaque chaîne peut clairement annoncer son obédience sans réel risque d'oppression. Un contrôle a posteriori des contenus diffusés est par contre opéré et les messages trop virulents font parfois l'objet d'une poursuite judiciaire. 

Une notion encore floue du droit d'auteur

De nombreuses chaines ne s'enquiquinent pas des règles du droit à la propriété intellectuelle et du droit d'auteur lorsqu'il s'agit de mettre en place la programmation. Une grande majorité des émissions et des œuvres filmiques diffusées à l'antenne n'ont pas obtenu d'autorisations. Ce piratage représente un réel manque à gagner pour les salles de cinéma qui tentent de renaître, du moins dans la capitale. 

Cette facilité à voler des productions tierces nuit également à la créativité. S'il fallait réellement acheter les droits afférant à chaque émission, il est clair que les chaines malgaches privilégieraient leur production propre afin de moins dépenser.  

Une diffusion numérique sur les bouquets payants pour les plus grandes chaines

A travers les bouquets payants proposés par les opérateur satellite et TNT comme Canal+, Startimes, Parapole Madagascar ou encore Blueline TV, plusieurs chaines de la capitale (TVM, Kolo TV, RTA, Record TV, Dream'in...) bénéficient d'une large diffusion dans les foyers abonnés. Cette audience élargie agit évidemment sur le coût de diffusion des publicités pour les entreprises.

L'audience numérique est néanmoins à relativiser, car son accès reste difficile pour le plus grand nombre. 


Le secteur de la télévision à Madagascar est apprécié pour son pluralisme, un peu moins pour sa qualité de service. On est nombreux à s'énerver du fait de la variation intempestive du volume sonore tout au long de la diffusion. C'est un exemple parmi tant d'autres couacs techniques. On espère voir une nette amélioration dans les années à venir avec la spécialisation des formations dans certains établissements d'enseignement supérieur. 

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